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la presse rock en France -
Dans Best n°15, signé SD :
The
Isle of Wight 1969 festival
(29, 30 & 31 Août 1969)
Été 2009, et on était à Londres depuis quelques semaines déjà... On avait assisté au festival de Plumpton, début Août, où Jocelyne Boursier (de Rock & Folk) nous avait notamment présenté à Giorgio Gomelsky, lequel avait toujours des tas de choses passionnantes à raconter, sur les Stones entre autres... Plus tard vers la fin du mois, le photographe Dominique Tarlé nous avait gentiment dépanné pour quelques jours en nous offrant l'hospitalité (on avait alors partagé ses reportages photo comme à la nouvelle boutique de sono Orange, où traînait Mick Fleetwood, ou au concert de Fat Matress au Marquee, où Noël Redding n'était pas avare de lignes de certaine poudre...). Et Tarlé aussi nous parlait des Stones : l'hiver précédent, il avait assisté à l'enregistrement de leur "Rock'n'Roll Circus" et ça l'avait visiblement beaucoup marqué (mais le meilleur restait à venir pour lui avec son séjour à Nellcôte, la villa de Keith à Villefranche-sur-Mer, deux ans plus tard)... Mais trêve de mythologie stonienne, il nous fallait reprendre notre vaillante 2CV (très pratique alors dans un London sans péage et presque sans embouteillage), direction Sud-Ouest, pour ce festival dont on parlait décidément beaucoup...
En arrivant sur l'île de Wight, on pensait donc faire un papier pour Rock & Folk (qui nous avait d'ailleurs fourni une lettre accréditative). Mais en chemin, on allait trouver une petite équipe de la rue Chaptal ! Car, réalisant la portée de l'événement, Philippe Kœchlin* lui-même s'était finalement déplacé avec Jean-Pierre Leloir (l'année suivante, ce serait une vraie délégation beaucoup plus fournie…). On peut d'ailleurs retrouver son article du n°33 de R&F reproduit dans le bouquin de Gilles Verlant "Le Rock et la plume". Du coup, on s'est dit qu'on n'avait qu'à envoyer notre compte-rendu au "concurrent"... Best (qui n'avait strictement personne sur le coup), en le signant Stevie Dixon (ex-nom de scène qu'on utilisait pour la 1ère fois pour l'écriture !)...
Les photos et la mise en page ne présentant guère d'intérêt (c'était
très irrégulier à Best, la présentation...) on vous livre plutôt ci-après
le texte lui-même de cet article (ce sera plus facile à lire). On n'a
pratiquement pas retouché (vous pourrez constater que nos bêtises d'époque
— et il y en avait…! — sont toujours là).
"Help Bob Dylan..?"
(On se demande qui avait choisi ce titre d'ailleurs, pas nous en tout cas !)
Des hippies... partout : la route de Londres à Portsmouth en était
jalonnée. (N.B.: C'est une indication assez sûre si vous vous rendez à
un Festival "Pop" : quand vous ne voyez plus de "hippies
stoppeurs", alors vous avez perdu votre route). A l'embarcadère, il en
était de même, mais les "British Railways" avaient bien fait les
choses : un ferry toutes les demi-heures. Pas question toutefois de
passer une voiture sans réservation car tout était loué jusqu'au
mercredi suivant. Certains groupes ont même eu quelques difficultés pour
leurs traversées de matériel.
Peu d'attente donc en ce vendredi soir. La mer est calme comme ces
pèlerins qu'elle porte par milliers. Les insulaires et autres indigènes
semblent quand même un peu bousculés, mais plus encore moralement que
physiquement sans doute. La plupart s'en accommoderont assez bien par la
suite (surtout les commerçants !), tandis que les résidents (l'île
de Wight, c'est un peu le mélange d'une Corse et d'une Côte d'Azur pour
l'Angleterre... au climat près) resteront généralement terrés dans leurs
luxueux hôtels ou propriétés. Mais personne n'est censé méconnaître
l'importance de l'invasion : après la télé nationale qui en a donné
un aperçu, la chaîne régionale vient encore de montrer longuement ces
hordes abordant l'île, qu'on croyait barbares et qu'on découvre plutôt
mystiques.
"Help Bob Dylan sink the Isle of Wight"
(aidez Bob Dylan à faire couler l'île de Wight). Le slogan a créé cette
formidable induction dont les lignes convergent de tous les azimuts: des
quatre (?) coins des lles Britanniques, bien sûr, mais aussi des U.S.A.,
de Suède et autres pays scandinaves, des Pays Bas, d'Allemagne, etc. Les
Français sont beaucoup moins nombreux — proportionnellement — qu'au
Festival de Plumpton... Il y en a cependant pas mal.
Des cars prennent le relais des bateaux (les tarifs sont assez modiques:
on se rattrape sur la quantité !) mais ils vous laissent encore à
quelque chose comme un mile du site du Festival. Sur le chemin
caillouteux qu'enveloppe la nuit profonde nous parviennent déjà avec le
vent des bribes d'amplification (beaucoup de journaux ayant déjà traités
de cette puissante amplification, je n'y reviendrai que pour signaler
qu'elle avait été spécialement construite par XXX). Cela se précise
bientôt et on reconnaît le son hilare du "Bonzo Dog Band".
Malgré les difficultés de la marche sous le poids des sacs, certains
rigolent déjà à l'audition des pitreries des Bonzos ; celles-ci
sont accompagnées généralement d'une musique de rock and roll très 1956
et plutôt satirique (Viv Stanshall débute avec "Blue Suede Shoes", on se
moque de ce qu'on aime, non ?). Leur set est presque terminé quand nous
arrivons et c'est, avec sensiblement le même show paraît-il (mais on ne
s'en lasse pas si vite), le même succès qu'au "Neuvième National Blues,
Jazz and Pop Festival" de Plumpton.
Notons qu'ici l'affiche est plus simple : "Second Isle of Wight Festival
of Music", cela correspond mieux à cette réalité actuelle qui évite de
s'encombrer de classifications. Les comparaisons entre ces deux grands
festivals du mois d'août anglais sont inévitables, mais les démesures du
second ont tendance cette année à écraser le premier, d'esprit très
différent et plus traditionnel: A Plumpton, à minuit — dernier
délai — tout était terminé. Ici, si un groupe plaît, le
présentateur demande au public de le rappeler (et ce public sera
vraiment bon enfant avec tout le monde !) et on remet ça ! Ainsi la
soirée du samedi se terminera vers 2 ou 3 heures du matin.
Mais nous ne sommes que vendredi et les Nice
rentrent en scène, sans le grand orchestre qui avait été le "clou" du
Festival précité, mais qui avait tendance a alourdir leur spectacle,
surtout par insuffisance de mise au point. Des nouveaux titres d'abord:
la "Pathétique" de Tchaïkovsky et "Hang on to a dream", de Tim Hardin,
avec Keith Emerson remarquable au piano ; Keith qui s'écartèle par
la suite entre deux orgues. "She belongs to me", d'un certain Dylan,
"Rondo 69", nouvelle version figurant sur leur récent 33t. Les Nice
jouent vraiment magnifiquement ce soir et le public leur en sera
reconnaissant. "America" en rappel.
SAMEDI (30-8)
La
nuit a été fraîche mais ceux qui n'avaient pas prévu peuvent encore
acheter, contre quelques shillings, quelques "pieds" de plastique pour
s'enrouler dedans ou se construire une tente de fortune. Ces abris
occasionnels parasitent notamment autour des grands chapiteaux du
"Village ", profitant de leurs cordes ! Ce Village s'éveille
progressivement tandis que déjà certains font la queue devant l'entrée
principale... ; et vers 10 heures, quand les guichets ouvriront (à
signaler le prix global: 35 "francs dévalués" pour les 3 jours) ils
traverseront le champ à la course avec tout leur "barda" pour avoir une
bonne place devant la scène ou du moins derrière l'enceinte où gravitent
journalistes et autres artistes... D'autres, que la fraîcheur ou la
musique de quelque flageolet avait tenu éveillé, profitent de la matinée
pour récupérer.. Les boutiques de disques, de posters, de revues, de
colifichets divers sont assaillies, mais les plus longues files
d'attente sont celles qui mènent... aux toilettes mobiles : des
files "sages" où l'on attend son tour sans chercher à passer devant son
voisin (difficile à comprendre pour un Français, n'est-ce
pas ?).
Le spectacle débute dès 15 heures avec "Gypsy"
: intéressant, "Blonde on Blonde":
en baisse, puis "Blodwyn Pig",
percutant et très musical tout à la fois. Mais c'est avec Edgar
Broughton que les choses se précisent et que le climat monte
(il fait d'ailleurs assez chaud à présent). Son style aux riffs très
obsessionnels semble porter sur le public qui lui fait un triomphe (il
aura droit à peut-être une heure de supplément). "Demons out". Une fille
se déshabille et vient danser (nue, par conséquent) devant les
photographes... qui s'en donnent à cœur-joie. "The People" et "News of
the World", chefs de file de la presse à scandales britanniques auront
de quoi se mettre sous la dent pour demain dimanche. L'imposant
présentateur au chapeau, Rickki Farr, qui orchestre l'ensemble avec un
minimum de fausses notes, demande à Jeff Dexter —frêle disc jockey aux
paroles emmêlées (les hippies ont des critères particuliers pour
promouvoir leur personnel) officiant habituellement au Middle Earth- de
passer quelques disques pour faire baisser la tension. Mais ce n'est
certes pas ce qui se produit avec le "Honky Tonk Women" des Stones car
chaque fois qu'arrive son rythme syncopé la foule est soulevée et se met
à danser ! Puis c'est Marsha Hunt
qui remobilise les photographes. Des versions de "Sympathy for the
Devil", "My world is empty without you", "Wild thing"... et un jeu de
scène très souple !
Les Who, qui viennent de faire
une arrivée remarquée en hélicoptère, dans un grand tourbillon de
poussière, sont déjà sur scène. Keith Moon peut jouer grâce à quelques
piqûres car il s'est fracturé le pied récemment en tombant dans un
escalier (?) et le groupe a dû annuler certains de ses contrats. Pete
Towshend, dans une combinaison blanche, fait penser à un aviateur (il
est vrai qu'il plane énormément). L'aigle dans le dos de John Entwistle
n'est pas pour rassurer quant à son air déjà peu "commode". La
"violence" de Roger Daltrey est plus exprimée : il fait voler
et son micro ("à la Johnny", pour ceux qui ne verraient pas bien), et
les franges de son costume de cuir (même adresse que l'ensemble —
réduit — de Marsha Hunt). Bref, il faut le dire, le show des Who
est maintenant une véritable merveille à tout point de vue, et ce fut un
des plus grands moments de ce Festival comme à celui de Plumpton. "I
can't explain", "Fortune teller", "Young man blues" en hommage à Mose
Allison, et avec un splendide solo de Pete ; puis de longs extraits
de cet "opéra" si subtil qu'est "Tommy". L'entendre sur scène lui donne
un nouveau relief, et on redécouvre ensuite le double-album avec plus de
joie encore. Et les "morceaux-chocs" pour finir: du rock comme les Who
et nous-mêmes l'aimons toujours avec "Summertime Blues", leur "My
Generation" (agréable surprise) et l'envoûtant "Shakin' all over" de
feu-Johnny Kidd.
Fat
Mattress ne fut pas la révélation espérée (espérée ou non). La
"Les Paul" de Noêl Redding (cadeau de Mitch Mitchell) était très mal
réglée semble-t-il ce jour là. Je les avais vus au début de la semaine
au Marquee et le groupe avait eu beaucoup plus d'impact. Cela n'empêcha
pas Jane Fonda de s'entretenir
longuement avec l'ancien bassiste de l'Experience ("La belle et la
bête"?). Ne soyons pas "mauvaises langues", au point de supposer qu'on
lui avait recommandé le "Gros Matelas" comme le dernier groupe, le plus
"in". Non. D'ailleurs les Vadim furent charmants et parurent intéressés
tout au long du Festival, ce qui peut les distinguer d'autres
"personnalités" ne s'étant pointées que pour le passage de Dylan. Autres
"présences" de consonances françaises (et sans allusion avec ma dernière
remarque. N.B.): Françoise Hardy avec Moustaki, et même France Gall,
sans parler des journalistes bien sûr.
Les Moodie Blues, malgré
la qualité et la fidélité de leurs interprétations, n'obtinrent pas
davantage que Fat Mattress un réel contact avec le public. Ils eurent
aussi quelques ennuis de matériel (mélotron distordant). Annette Brox se
joint à son mari Victor, chanteur du groupe de Aynsley
Dunbar pour un duo vocal qui fut très apprécié.
La musique — et l'attitude aussi— des Pretty
Things sont plus underground que jamais (si cela veut encore
dire quelque chose). Eux aussi pratiquent le "riff", mais ils mettent
quelque chose dessus, Dick Taylor vient jouer dans "Revolution" (rien à
voir avec les Beatles, ce morceau étant antérieur à toutes leurs
révolutions numérotées), mais l'arrivée de membres de Fat Mattress,
venus innocemment pour jammer, rompt le climat. Joe
Cocker n'a rien perdu de sa "soul", mais le genre est
peut-être en baisse de popularité car depuis le "Dear Landlord" de Dylan
jusqu'à l'inévitable "With a little help from my friends", il ne
retrouve pas la même emprise que — par exemple — à Sunbury l'an passé.
Autre climat avec la magie de Family,
qui termine le programme. Des nouvelles chansons mais toujours aussi
celles de l'album "Family Entertaiment" comme "The weaver's answer" ou
"Observations from a hill". Family est un groupe qu'on apprécie peu "du
premier coup". Il faut au moins connaître leurs chansons et si possible
les voir plusieurs fois sur scène. Tout devient alors plus clair.
DIMANCHE (31-8)
Une machine à fabriquer de la mousse donna lieu le dimanche matin
à divers débats plus ou moins enfantins (voir gamine adorable au cordon
dans les cheveux qui eut droit à la couverture de "Paris-Match") ou à
des happenings moins innocents (couple faisant l'amour dans la mousse).
Le spectacle débuta encore peu après-midi avec "Liverpool
Scene" interprétant des sortes de pots-pourris rock (les
adversaires intercaleraient un "très", dans cette dernière expression,
tandis que les amateurs vous parleraient d'une poésie qui m'aura
échappé). Suivent "Third Ear Band",
puis "Indo Jazz Fusion". Le
climat oriental qui pèse sur l'assistance est maintenant le fait de la
musique autant que des lourds parfums d'encens et de haschisch qui
planent toujours au-dessus du champ.
Du folk ensuite, dans ce programme assez savamment réparti, avec Gary
Farr (frère du présentateur) : c'est agréable et
intelligent, puis avec Tom Paxton
qui fait un véritable triomphe, assez inattendu, en chantant les
"Marines" au Vietnam ("Talking Vietnam Pot Luck Blues") ou d'autres
façons de mourir des Américains ("Forest Lawn") Tom Paxton est
sincèrement ému d'une telle ovation en Angleterre.
Passage troublé pour Pentangle,
dont l'audition mérite du silence pourtant: Un avion vient ronfler à
basse altitude et les Stones Keith, Charlie and Bill trouvent moyen
d'arriver, au beau milieu de "Bruton Town", d'où une certaine panique
d'appareils photographiques!
Julie Felix eut également sa
tranche de succès de la part d'un public toujours gentil auquel elle
offrit en récompense une chanson très maternelle: "Going to the Zoo"...
Richie Havens reçut également un
accueil enthousiaste, largement mérité par l'intensité de ses
interprétations de ses propres chansons ou de celles des autres comme
"Maggie's farm" et "Strawberry Fields forever".
Après des instants de semi panique devant et derrière la scène à cause
du trop grand nombre de journalistes et autres "invités" qu'on
n'arrivait pas à faire tenir dans l'enceinte réservée, le spectacle put
enfin reprendre après 22 heures avec The
Band, l'orchestre de Dylan. Très fidèles au disque, comme les
Moodie Blues, malgré la complexité — vocalement surtout— de leur
musique. Tous sont de très bons musiciens dans des styles assez
singulièrement différents des instrumentalistes "pop" que nous
connaissons bien. Les chansons appartiennent pour la plupart à ce fameux
33 tours de "Big Pink" (non paru en France: une honte !) ; quelques
classiques de country-and western aussi.
DYLAN
Enfin, vers 23 heures, un sixième membre se joint au groupe et
entame "She belongs to me". Ce fut alors, pour ces quelques deux cent
mille hippies, la redécouverte progressive d'un de leur héros. Car il a
beaucoup changé: — d'apparence d'abord : costume blanc assez ample,
chemise ouverte, barbe éparse, — de style ensuite, et surtout; la
voix plus étendue, plus souple et mélodieuse a perdu ses accents
nasillards d'âpreté et d'ironie continuelle, la musique est d'une
électrification moins "agressive" disons (car l'accordéon dans "I pity
the poor immigrant" était électrifié aussi !). Le rebelle n'est
plus semble-t-il, il aurait cédé le pas au père de famille (4 enfants)
heureux de la vie.
Le monde juge de la métamorphose par les yeux et les oreilles de ceux
qui sont là : du plus "humble" hippie perdu dans le champ au milieu
des 199.999 autres, jusqu'à tous, artistes, qui sont un peu tous les
disciples de Dylan... Même les Beatles, dont la sérénité au demeurant
reste fort troublée par les photographes insatiables (quelle
vie !). Blind Faith est là aussi. Julie Driscoll, coincée près de
moi et dans la même position inconfortable due à la foule trop entassée,
paraît oublier cet inconvénient mineur, toute absorbée qu'elle est par
la présence de ce "maître". Elle semble boire ses paroles, se délecter
de son feeling, et son visage si fin oscille à peine au rythme de la
musique.
Parce qu'il vit vraiment ce rythme, le créateur de "Wheels on fire"
"berce" parfois sa guitare en un geste d'une élégance touchante. Entre
les chansons, pas de mots inutiles, juste de brefs remerciements et
quelques sourires, un peu contractés au début car l'idole des idoles est
restée très timide. Il chante quatre chansons sans accompagnement de
l'orchestre : c'est un retour à une certaine simplicité par le
langage de cette musique country à laquelle il insuffle aujourd'hui une
nouvelle vigueur. "I threw it all away", "Maggie's farm", "Wild
mountain Thyme", (folklore irlandais), "To Ramona ", "Mr. Tambourine
Man" (un des meilleurs moments, des plus émouvants en tous cas). La
plupart de ses interprétations, musicalement parfaites, sont
fondamentalement différentes des originales, mais dans certains cas on
peut objecter qu'un répertoire neuf serait peut-être préférable. Ainsi
"Like a rolling stone", "It ain't me babe" ou "Rainy day women" semblent
perdre leur cachet en s'adoucissant, leur raison d'être même ;
l'acidité d'antan manque alors à l'œuvre. Un seul vrai nouveau titre sur
les dix-sept interprétés: "Who's gonna throw that..." (?: les avis
divergent sur la suite, devant l'absence de déclaration officielle).
Après un rappel de deux chansons qui porte la durée de son passage à un
peu plus d'une heure, Dylan ne revient pas. Le public est un peu
déconcerté. Des revues pop avaient notamment contribué à laisser croire
plus ou moins officiellement à cinq heures de spectacle et à une
"jam-session" fabuleuse (?) et certains esprits chagrins calculent déjà
qu'un "salaire" de plus de 500 livres à la minute est un peu élevé. Mais
l'important reste ce changement du personnage, changement au moins
apparent et qui se révèle d'un coup pour le public comme pour les autres
observateurs... et qu'il est bien difficile d'assimiler, d'admettre
simplement, "sur-le-champ". Dylan est loin de ces chanteurs qui
s'adaptent au moment ! C'est plutôt le public qui doit tenter de le
suivre dans son évolution, sans rester bloqué à une étape ou à une
autre, encore que l'on puisse avoir une préférence!). "Dylan est mort"
titrait, en d'autres termes, le lendemain, un journal n'ayant rien
compris. Nous répondrons simplement alors "Vive Dylan".
Quant à ce Festival qui fut une si belle réussite cette année après un
timide mais encourageant début l'an passé, il convient de lui souhaiter
une longue carrière également. Il est utile de constater à cette
occasion la "prise de conscience" qu'il a constitué pour la presse et
les télévisions. Ils ont souvent considéré ce phénomène du festival de
Pop Music comme nouveau, ce qui n'est pas précisément le cas ;
seule l'ampleur extraordinaire des manifestations de cet été (que ce
soit à Bethel, à Woodstock ou ici, à Wight) est nouvelle. Les foules de
Hyde-Park en juin et juillet étaient déjà au moins égales, sans que le
Français moyen — par exemple — en ait été
informé ! Le contrecoup de cette récente "publicité"
serait de transformer le "pèlerinage" en "tourisme" l'année prochaine.
Espérons qu'il n'en sera pas trop ainsi !...
Steve DIXON.
(NB : La photo de Dylan (avec Robbie Robertson) ci-dessus n'était pas
dans Best ! On peut la trouver avec beaucoup d'autres sur ce site de The
Band : http://theband.hiof.no/band_pictures/band_and_dylan.html)
Les autres photos sont signées SD© : Dancing girl, Free (Paul Kossoff & Paul Rodgers), qu'on avait oublié dans notre article ! (shame on us…) et The Who (Keith & Pete).
*PS : En plus de son compte-rendu dans "son" Rock & Folk, Ph. Koechlin avait livré un second reportage de l'événement au Nouvel Observateur. En voici le fac-similé (lisible en cliquant sur la miniature). Mais son article avait fâcheusement été inclus... dans un dossier sur la drogue !! Ce qui en dit long sur un certain état d'esprit qu'on pouvait trouver à l'époque ...même au Nouvel Obs'! (Notez bien que le papier de Philippe K n'avait pas du tout été rédigé dans cette optique, et les titres "évocateurs" avaient été bien sûr rajoutés à son insu !).
PS
2007
(soit plus de 38 ans après !!)
Parmi les "people" (ça n'était pas encore devenu un mot
français) présents dans l'enceinte VIP (...et ce sigle non plus) en ce
31 Juillet 1969, on pouvait remarquer Keith Richards, Charlie Watts,
John & Yoko, George & Ringo (NB: beaucoup n'étaient arrivés que
pour le passage de Dylan..), Steve Winwood & Ric Grech (alors de
Blind Faith !), Jim Capaldi avec femme et enfant (qui reprit
contact avec Winwood ici même, on signale ça pour les fans de Traffic),
et pour ceux venus de France, Françoise Hardy & Moustaki, France
Gall, Jane Fonda & Roger Vadim…
Avec la petite équipe (cette
année-là) de Rock & Folk trouvée en route (juste Kœchlin et Leloir,
plus Jocelyne Boursier), nous étions souvent en compagnie de Giorgio
Gomelsky et de Julie Driscoll. Celle-ci (qui ne chantait plus avec Brian
Auger depuis quelque temps) fut d'ailleurs sous nos yeux présentée par
Giorgio à …Moustaki (en tant qu'auteur pour Piaf..) puis à Al Grossman
lui-même*...
...Sous nos yeux et même sous notre
objectif : en effet, ce jour-là (31-7-69), on avait pris plein de
photos qu'on jugeait remarquables : avec comme modèles consentants et
gratuits des "beautées naturelles" comme Jane F ou Julie D (une
occasion qui ne se présentait pas vraiment tous les jours...) sans
parler de quelques autres festivalières nues dans la mousse qu'on
avait croisées en passant... Puis on avait immortalisé (comme on
dit...) l'arrivée de Keith R, et celle de John & Yoko... Tout ça
pour nous apercevoir un peu tard (c'est vrai que ça commençait
décidément à faire beaucoup de photos pour un seul film !) que notre
pellicule 36 poses avait été mal accrochée et qu'elle ne s'était donc
pas enroulée !! Zéro photo, imaginez la méga déception... C'est sans
doute puéril, mais 38 ans après, on n'a toujours pas bien digéré ce
coup-là !!
SD
NB : On a quand même celle-ci (photo à droite, un peu floue…) de Noël Redding avec Jane
F. Tirée de la pellicule précédente... Et ©SD bien sûr !
(*: Albert Grossman, manager de Dylan, qui était d'ailleurs censé
l'avoir quitté à cette époque… Al devait s'occuper surtout de
Janis Joplin dorénavant, mais toujours de The Band, ce qui explique qu'il était encore dans les parages du Zim…)
Sur ce festival de Wight 69…
(I.O.W. 1969)
...sur Wikipedia
(english)
...sur un site qui a archivé de nombreux festivals britanniques : www.ukrockfestivals.com/iow1969.html
Un reportage de la télévision française (~ 12 mn) que l'on retrouve sur le site de l'I.N.A. ("L'île aux hippies")
Un
livre a été consacré aux trois premiers festivals de l'île de Wight (en
anglais), aujourd'hui difficile à trouver :
The isle of wight festival, 1968 - 1969 - 1970 > Message
to Love, de Brian Hinton
(lien Amazon.fr)
Par la suite, on allait donc bénéficier d'une carte "officielle" du mag en question...
...Pour faire principalement quelques comptes-rendus de Montreux (Paringaux s'étant accaparé la connexion Montreux du côté R&F !)
Et l'on ne vous parle guère de BEST, tout compte fait, dans cette page… Heureusement, on trouve désormais un article très détaillé sur ce magazine dans Wikipédia.
PS: …et un groupe sur Facebook, animé par Bruno Blum, où vous trouverez des photos rares, assorties de judicieux commentaires !
Bruno Blum, rock-critik (ancien de Best, donc) éclectique et prolifique, dessinateur, guitariste et chanteur à l'occasion, également nommé Doc Reggae...
Sortie en 2010 du recueil BEST OF BEST (Les années 1968 / 1979)
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